Aujourd'hui, petit cours de vocabulaire
pour débutant non-agresseur. Ne soyez pas offusqué si, ne vous
sentant pas concerné par ce sujet, vous avez l'impression que je
vous prends un peu pour des abrutis finis : je vous garantis que
si je prends la peine d'user mes petits doigts sur un clavier pour
vous pondre un accès de pédagogie, c'est que j'ai croisé pas mal
de personnes qui ont du mal avec des concepts de base. C'est un peu
quand on rédige un manuel d'utilisation. Tout le monde trouve
profondément stupide de préciser qu'on ne sèche pas son chat dans
un micro-ondes, et pourtant...
Même si vous estimez n'avoir vraiment
rien à apprendre de cet article, laissez-moi vous suggérer d'y
jeter un coup d'oeil en diagonale. Sait-on jamais, parfois, on
redécouvre plein de choses en feuilletant un cours pour débutant !
Commençons en douceur par le mot «
excuses ». J'ai noté qu'un certain nombre de gens éprouvaient
des difficultés avec ce terme, ainsi qu'avec ses corollaires
« Désolé » et « pardon ». Je vous propose
avant tout une définition simple de la présentation des excuses :
signifier à quelqu'un qu'on accepte
le fait qu'on a fait une connerie et que l'on est prêt à en assumer
les conséquences.
Facile,
pas vrai ? Alors passons à ce que des excuses ne sont pas :
- Un passage d'éponge auto-proclamé sur un acte ou des propos problématique-s
- Un sauf-conduit pour s'affranchir de ses responsabilités et des réparations éventuelles dudit acte/desdits propos
- Un bon pour réitérer ou poursuivre ses bêtises tant que le mot « désolé » est prononcé régulièrement
- Un bon pour des cookies
Je
vous sens perplexe, on précise un peu tout ça ?
Les
excuses ne sont pas un passage d'éponge auto-proclamé sur un acte
ou des propos problématique-s
Présenter
ses excuses est rarement une mauvaise chose en soi : dire à la
personne qu'on a blessée qu'on a pris conscience d'avoir mal agi
permet de lui signaler qu'on a quelque chose à faire de son ressenti
et qu'on tient compte de ce qu'elle attend de nous. Malgré tout le
mal est fait et selon les dégâts occasionnés, la faute peut
s'oublier facilement... ou avoir des répercussions plus importantes.
Or,
s'il appartient à celui qui a déconné de tout faire pour réparer,
il n'a aucun droit à exiger que l'autre efface son ardoise au seul
motif que lui, ça l'arrangerait bien ! Les excuses sont une
étape préliminaire à la réparation de dégâts ou à la
modification d'un comportement, non la conclusion automatique d'un
litige.
Les
excuses ne sont pas un sauf-conduit pour s'affranchir de ses
responsabilités et des réparations éventuelles d'un acte/de propos
problématique-s
Un
peu de logique : si vous admettez être responsable d'une chose
négative, vous ne pouvez pas rester sur ces jolies paroles et
espérer qu'elles aient un effet guérisseur magique et suffisant. Ca
peut peut-être diminuer légèrement le ressentiment et/ou la
douleur de celui/celle que vous avez blessé-e, mais les paroles
semées au vent montreront toujours moins que des actes concrets
votre volonté de corriger le tir. Tenter de réparer ce que l'on a
cassé est un effort nécessaire.
Les
excuses ne sont pas un bon pour réitérer ou poursuivre ses bêtises
tant que le mot « désolé » est prononcé régulièrement.
Le
préalable à tout début de réparation... c'est de ne pas avoir en
tête de recommencer la même connerie après avoir présenté ses
excuses ! Logique, non ? Pas pour tout le monde... et c'est
ennuyeux. Comme on l'a vu plus haut, dire qu'on est désolé n'est
pas prononcer une formule magique : si vous ne changez rien au
problème derrière et enchaînez joyeusement en continuant sur votre
lancée, le signal envoyé est qu'au fond, vous n'avez cure des
reproches adressés.
J'amende
un peu ce passage : vous pouvez parfaitement estimer que vous
n'avez pas de torts, mais qu'en face, votre action/propos peut être
perçu de manière désagréable. Ca peut très bien se défendre,
mais dans ce cas vous ne devez pas attendre qu'en face on change son
ressenti pour vous agréer. Vous pouvez l'espérer, hein... mais ça
ne dépend plus de vous.
Les
excuses ne sont pas un bon pour des cookies
Vous
souvenez-vous de la définition du cookie dans le vocabulaire
féministe, donnée dans un précédent article ? Une récompense
espérée pour avoir fait une chose normale. Est-il besoin de
préciser plus ma pensée ?
Jusque-là,
tout le monde suit ? Parfait. Poursuivons donc avec deux grosses
erreurs à éviter quand on présente ses excuses (car non, on ne
s'excuse pas soi-même, contrairement à ce qui est communément dit,
on présente à l'offensé-e la possibilité d'accepter nos excuses.
En gros, on accepte de perdre le contrôle. Désagréable ?
Indispensable néanmoins !)
Bien entendu, ce qui suit ne vaut que si on souhaite présenter des excuses sincères, et qu'on sent qu'il faut faire amende honorable. Il y a forcément des cas où les reproches nous semblent illégitimes, voire où on peut se sentir ouvert à la discussion sans désirer endosser de responsabilité. Ca rentre dans un autre domaine, que nous n'allons pas voir aujourd'hui.
Bien entendu, ce qui suit ne vaut que si on souhaite présenter des excuses sincères, et qu'on sent qu'il faut faire amende honorable. Il y a forcément des cas où les reproches nous semblent illégitimes, voire où on peut se sentir ouvert à la discussion sans désirer endosser de responsabilité. Ca rentre dans un autre domaine, que nous n'allons pas voir aujourd'hui.
Première
erreur que j'ai pu observer fréquemment : les fausses excuses
qui masquent un renvoi de la culpabilité vers la personne lésée.
Ce
n'est jamais agréable d'être pris en défaut. Et il arrive que la
tentation soit très grande de nier sa faute pour mieux la replacer
sur d'autres épaules. Et tant qu'à faire, autant charger la
personne qui nous fait comprendre qu'on l'a heurtée ! Par
exemple, marcher sur le pied de quelqu'un et lui reprocher d'être
sur le passage, ce n'est pas très logique... et encore plus
désagréable pour celui ou celle qui a vu son pied se faire
allègrement piétiner !
Concernant
des actes plus graves, entendre un « je suis désolé mais si
tu n'avais pas... » ou un de ses dérivés va bien au-delà du
simple agacement et peut faire de sacrés ravages. En plus de gérer
les dégâts, la victime doit prendre sur elle une part de
culpabilité qui ne lui revient pas en réalité.
Sur
ce sujet, je vous renvoie avec plaisir à une bien meilleure
pédagogue que moi :
https://dansmontiroir.wordpress.com/2016/09/22/le-victim-blaming-ou-pourquoi-je-gronde-mon-chat-apres-lui-avoir-marche-sur-la-queue/
Seconde erreur classique : présenter des excuses en minimisant ce qu'on a fait et/ou ses conséquences.
Seconde erreur classique : présenter des excuses en minimisant ce qu'on a fait et/ou ses conséquences.
Parfois,
quand on est visé par des reproches, ce n'est pas simple de prendre
la mesure de ce qu'on a fait subir. Et une défense naturelle
consiste à essayer de baisser artificiellement la portée de ses
actes. Malheureusement, la personne qui a subi est plutôt bien
placée pour parler de son préjudice... précisément parce qu'elle
l'a subi. Et croyez-moi, en dehors du cas précédent, il y a bien
peu de choses aussi désagréable que d'entendre que non, on a pas si
mal qu'on le prétend et qu'on exagère... C'est une autre façon de
se sentir nié-e.
Ainsi se termine ce petit cours d'initiation sur le thème des excuses... d'autres personnes ont fait des articles sur ce vaste sujet, tout autant pertinents, sinon plus, que le mien. N'hésitez pas à approfondir vos connaissances en la matière, un excès de culture est rarement nuisible !
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