Ils te
font envie, les macarons de l'image ? Eh bien je viens d'en
faire une bonne fournée. Installe-toi, ta tasse de thé t'attend. Tu
es de plus en plus réticent à venir à ma table, je me demande bien
pourquoi. L'idée de me laisser ce petit espace virtuel de contrôle
te répugnerait-elle ?
Aujourd'hui
nous allons un peu nous attarder sur une autre de tes déplaisantes
ritournelles. Je l'avais déjà un peu évoquée, mais pour avoir
causé avec pas mal de monde (fort étonnamment en général de sexe
masculin) j'ai vraiment l'impression qu'il est utile de développer
en quoi ce que tu exprimes est gênant, voire dangereux.
« J'ai
tout fait pour elle/je suis un gars bien, elle me doit bien une
contrepartie ! Je vais arrêter d'être gentil pour la
peine !»
Je ne
sais pas comment t'annoncer ça avec tact, mais la vie ne marche pas
exactement comme une lettre à la mère noël. C'est décevant, j'en
conviens. Ce n'est pas parce que tu es bien sage pendant l'année
que tu vas obtenir du sexe ou des sentiments amoureux en échange à
la fin. Être gentil et poli, rendre service ou offrir le restaurant
à quelqu'un ne t'ouvre aucun droit sinon celui au respect. Tu me
concéderas que le respect n'implique pas de céder à tes avances,
dis ?
Sois
serviable et aimable si tes valeurs t'y poussent. Sois désagréable
si tu as un caractère de cochon. Mais s'il est effectivement plus
probable que tu séduises quelqu'un en ayant un comportement positif,
malheureusement, ça n'a rien d'une équation mathématique. Tu n'as
pas forcément envie de coucher avec tous ceux que tu apprécies,
si ? Et ce, même si eux manifestent de l'intérêt pour toi ?
Pourquoi en irait-il différemment de la personne sur qui tu as des
vues ?
Ce qui
me fait peur dans ton raisonnement, c'est tout ce qu'il implique :
que tu es une personne agréable uniquement par intérêt égoïste
et non parce que tu estimes que c'est une attitude normale et saine
pour tout le monde. Au fond, si je pousse à peine un cran plus loin,
ça veut juste dire que tu n'es gentil que pour obtenir ce que tu
souhaites de la manière la moins compliquée possible. Tu essaies la
méthode légale avant de forcer les choses en somme ?
Si je
te suis, si tu n'espères plus une récompense pour ta bonne
conduite, qui deviendras-tu ? Si tu n'as pas ton susucre quand
tu fais le beau, tu mords ? A partir de quel degré de
reconnaissance à tes bonnes œuvres renonces-tu à devenir méchant ?
A partir de quel stade de frustration ai-je à craindre de toi ?
Serais-tu une bête à peine dressée et conditionnée à réagir à
certains stimuli ? Je préfère croire que tu es un être
pensant et raisonnable, capable de discerner tes envies et besoins de
ceux de tes congénères. Est-ce te faire trop d'honneur ?
Autre
chose me turlupine dans tout ça. Si c'est par gratitude qu'une
personne accepte une partie de jambes en l'air, est-ce vraiment un
acte entre deux personnes sur un pied d'égalité ou juste l'un qui
paie sa dette à l'autre ? On peut estimer que c'est une manière de
te remercier et dans ce cas, libre à la personne d'agir comme elle
le sent, mais un remerciement ne s'exige pas. A l'autre d'évaluer la
forme et le degré de reconnaissance qu'elle te doit.
Tu te
doutes bien que ce souci se pose d'autant plus fortement avec des
sentiments amoureux liés aux mêmes facteurs.
Maintenant,
si on inversait un peu les choses ? Si je comprends bien, pour
toi amour et/ou sexe ne sont en quelque sorte que des objets de
transaction. Donc n'importe qui peut aussi bien les attendre de toi
pour peu qu'il se montre charmant en ta compagnie... Je serais fort
curieuse de voir ta tête quand ton ami d'enfance Jean-Jacques te
regardera un beau jour, les yeux remplis d'espoir, estimant qu'il t'a
assez donné pour que tu lui offres ton cœur ou ton corps. Et
Isabelle, cette autre amie qui t'a souvent entendu te plaindre de tes
infortunes diverses, a-t-elle un quota à remplir avant d'exiger que
tu te mettes à poil ? Ni l'un ni l'autre ne t'attirent, mais ça
ne devrait pas te poser souci, selon tes principes, si ?
J'ai un
peu l'impression que comme souvent, tu songes pas mal aux droits qui
te sont ouverts, mais peu aux devoirs qu'ils impliquent en échange.
J'aimerais, puisqu'on est sur ce terrain, te rappeler deux ou trois
trucs en passant :
D'abord,
si tu perçois les interactions humaines comme des relations plus ou
moins contractuelles, je te signale que tu ne peux exiger de
quelqu'un qu'il respecte un accord dont il n'a guère de moyens de
connaître les tenants et aboutissants, puisque tu es celui qui les
détermine unilatéralement. Si tu espères qu'un sourire à ta
boulangère entraîne l'acquisition d'une baguette de pain, tu
risques une déception : rien ne peut la porter à penser que ta
bonne mine est un paiement suffisant pour ses miches. Ahem...
passons.
Considérons
un instant ton hypothèse, à savoir que les termes de l'échange
« gentillesse-sexe » sont au moins intuitivement déduites
par l'autre. Crois bien que ça m'écorche sacrément la plume et les
neurones, mais il me semble une fois de plus utile de démontrer
qu'en allant dans ton sens, ça ne marche pas vraiment non plus.
Ok,
Truc ou Machin ne respecte pas sa part de l'engagement et c'est
regrettable. Mais ça ne t'ouvre pas un laissez-passer pour le lui
faire « regretter » au-delà d'une cessation des échanges
entre vous. Je sais que je vais encore t'attrister, mais le recours
pour non exécution d'une prestation sexuelle va être un peu dur à
faire admettre en justice. Et tu n'as pas le droit de lui faire
encourir des dommages en retour, sous peine de commettre à ton tour
un acte illégal. Et il serait absurde d'étendre ton mécontentement
au reste de la population qui t'attire : deux ou trois mauvaises
expériences, voire même une dizaine, ne font pas une généralité !
A la limite, la seule leçon à en tirer c'est que ton postulat de
base tient assez peu debout, si tu ne croises pas de gens prêts à
le suivre ?
Tu
sembles las, mon grand, écrasé par le poids de mon incompréhension
de tes souffrances. Mais tout ce que tu subis, désillusions
amoureuses ou sexuelles, tu te l'infliges en grande partie tout seul,
parce que tu te centres tellement sur tes ressentis que tu t'empêches
d'éprouver de l'empathie réelle envers les autres. Faire des actes
positifs est une bonne chose : les faire par réelle affection
ou parce que tu suis « ce que te dicte ton coeur », comme
le dirait la littérature conséquente sur ce thème, ça me semble
plus sain et fructueux. Ca place tout le monde sur un pied d'égalité.
Allez,
sèche tes larmes et reprends un macaron, il reste plein de thé pour
le faire passer...
Cette
troisième heure du thé a bien tardé à sortir. Je ne m'en
excuserai pas et me contenterai de vous dire que j'espère que le
rythme de publication sera plus stable au fur et à mesure.Si tout se passe bien, d'ici un à deux jours, quelques articles viendront rééquilibrer le silence de ces derniers temps.
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