samedi 15 octobre 2016

Les excuses...

Aujourd'hui, petit cours de vocabulaire pour débutant non-agresseur. Ne soyez pas offusqué si, ne vous sentant pas concerné par ce sujet, vous avez l'impression que je vous prends un peu pour des abrutis finis : je vous garantis que si je prends la peine d'user mes petits doigts sur un clavier pour vous pondre un accès de pédagogie, c'est que j'ai croisé pas mal de personnes qui ont du mal avec des concepts de base. C'est un peu quand on rédige un manuel d'utilisation. Tout le monde trouve profondément stupide de préciser qu'on ne sèche pas son chat dans un micro-ondes, et pourtant...

Même si vous estimez n'avoir vraiment rien à apprendre de cet article, laissez-moi vous suggérer d'y jeter un coup d'oeil en diagonale. Sait-on jamais, parfois, on redécouvre plein de choses en feuilletant un cours pour débutant !





Commençons en douceur par le mot « excuses ». J'ai noté qu'un certain nombre de gens éprouvaient des difficultés avec ce terme, ainsi qu'avec ses corollaires « Désolé » et « pardon ». Je vous propose avant tout une définition simple de la présentation des excuses : signifier à quelqu'un qu'on accepte le fait qu'on a fait une connerie et que l'on est prêt à en assumer les conséquences.

Facile, pas vrai ? Alors passons à ce que des excuses ne sont pas :

  • Un passage d'éponge auto-proclamé sur un acte ou des propos problématique-s
  • Un sauf-conduit pour s'affranchir de ses responsabilités et des réparations éventuelles dudit acte/desdits propos
  • Un bon pour réitérer ou poursuivre ses bêtises tant que le mot « désolé » est prononcé régulièrement
  • Un bon pour des cookies

Je vous sens perplexe, on précise un peu tout ça ?


Les excuses ne sont pas un passage d'éponge auto-proclamé sur un acte ou des propos problématique-s

Présenter ses excuses est rarement une mauvaise chose en soi : dire à la personne qu'on a blessée qu'on a pris conscience d'avoir mal agi permet de lui signaler qu'on a quelque chose à faire de son ressenti et qu'on tient compte de ce qu'elle attend de nous. Malgré tout le mal est fait et selon les dégâts occasionnés, la faute peut s'oublier facilement... ou avoir des répercussions plus importantes.

Or, s'il appartient à celui qui a déconné de tout faire pour réparer, il n'a aucun droit à exiger que l'autre efface son ardoise au seul motif que lui, ça l'arrangerait bien ! Les excuses sont une étape préliminaire à la réparation de dégâts ou à la modification d'un comportement, non la conclusion automatique d'un litige.


Les excuses ne sont pas un sauf-conduit pour s'affranchir de ses responsabilités et des réparations éventuelles d'un acte/de propos problématique-s

Un peu de logique : si vous admettez être responsable d'une chose négative, vous ne pouvez pas rester sur ces jolies paroles et espérer qu'elles aient un effet guérisseur magique et suffisant. Ca peut peut-être diminuer légèrement le ressentiment et/ou la douleur de celui/celle que vous avez blessé-e, mais les paroles semées au vent montreront toujours moins que des actes concrets votre volonté de corriger le tir. Tenter de réparer ce que l'on a cassé est un effort nécessaire.


Les excuses ne sont pas un bon pour réitérer ou poursuivre ses bêtises tant que le mot « désolé » est prononcé régulièrement.

Le préalable à tout début de réparation... c'est de ne pas avoir en tête de recommencer la même connerie après avoir présenté ses excuses ! Logique, non ? Pas pour tout le monde... et c'est ennuyeux. Comme on l'a vu plus haut, dire qu'on est désolé n'est pas prononcer une formule magique : si vous ne changez rien au problème derrière et enchaînez joyeusement en continuant sur votre lancée, le signal envoyé est qu'au fond, vous n'avez cure des reproches adressés.

J'amende un peu ce passage : vous pouvez parfaitement estimer que vous n'avez pas de torts, mais qu'en face, votre action/propos peut être perçu de manière désagréable. Ca peut très bien se défendre, mais dans ce cas vous ne devez pas attendre qu'en face on change son ressenti pour vous agréer. Vous pouvez l'espérer, hein... mais ça ne dépend plus de vous.


Les excuses ne sont pas un bon pour des cookies

Vous souvenez-vous de la définition du cookie dans le vocabulaire féministe, donnée dans un précédent article ? Une récompense espérée pour avoir fait une chose normale. Est-il besoin de préciser plus ma pensée ?



Jusque-là, tout le monde suit ? Parfait. Poursuivons donc avec deux grosses erreurs à éviter quand on présente ses excuses (car non, on ne s'excuse pas soi-même, contrairement à ce qui est communément dit, on présente à l'offensé-e la possibilité d'accepter nos excuses. En gros, on accepte de perdre le contrôle. Désagréable ? Indispensable néanmoins !)
Bien entendu, ce qui suit ne vaut que si on souhaite présenter des excuses sincères, et qu'on sent qu'il faut faire amende honorable. Il y a forcément des cas où les reproches nous semblent illégitimes, voire où on peut se sentir ouvert à la discussion sans désirer endosser de responsabilité. Ca rentre dans un autre domaine, que nous n'allons pas voir aujourd'hui.


Première erreur que j'ai pu observer fréquemment : les fausses excuses qui masquent un renvoi de la culpabilité vers la personne lésée.
Ce n'est jamais agréable d'être pris en défaut. Et il arrive que la tentation soit très grande de nier sa faute pour mieux la replacer sur d'autres épaules. Et tant qu'à faire, autant charger la personne qui nous fait comprendre qu'on l'a heurtée ! Par exemple, marcher sur le pied de quelqu'un et lui reprocher d'être sur le passage, ce n'est pas très logique... et encore plus désagréable pour celui ou celle qui a vu son pied se faire allègrement piétiner !
Concernant des actes plus graves, entendre un « je suis désolé mais si tu n'avais pas... » ou un de ses dérivés va bien au-delà du simple agacement et peut faire de sacrés ravages. En plus de gérer les dégâts, la victime doit prendre sur elle une part de culpabilité qui ne lui revient pas en réalité.

Sur ce sujet, je vous renvoie avec plaisir à une bien meilleure pédagogue que moi :
https://dansmontiroir.wordpress.com/2016/09/22/le-victim-blaming-ou-pourquoi-je-gronde-mon-chat-apres-lui-avoir-marche-sur-la-queue/

Seconde erreur classique : présenter des excuses en minimisant ce qu'on a fait et/ou ses conséquences.
Parfois, quand on est visé par des reproches, ce n'est pas simple de prendre la mesure de ce qu'on a fait subir. Et une défense naturelle consiste à essayer de baisser artificiellement la portée de ses actes. Malheureusement, la personne qui a subi est plutôt bien placée pour parler de son préjudice... précisément parce qu'elle l'a subi. Et croyez-moi, en dehors du cas précédent, il y a bien peu de choses aussi désagréable que d'entendre que non, on a pas si mal qu'on le prétend et qu'on exagère... C'est une autre façon de se sentir nié-e.


Ainsi se termine ce petit cours d'initiation sur le thème des excuses... d'autres personnes ont fait des articles sur ce vaste sujet, tout autant pertinents, sinon plus, que le mien. N'hésitez pas à approfondir vos connaissances en la matière, un excès de culture est rarement nuisible !

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